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Enseignes du commerce spécialisé : une activité chaotique et un modèle économique sous pression

Enseignes du commerce spécialisé : une activité chaotique et un modèle économique sous pression

Sur neuf mois, l’activité des enseignes du commerce spécialisé en magasin, sur les marchés de l’équipement de la personne, de l’équipement de la maison et – nouveauté –, du sport, connaît des croissances très faibles en valeur par rapport à 2022 (entre +0,1 % et +1,5 %). Ce qui démontre la poursuite des baisses de volumes vendus, déjà constatées avant l’été.

Procos (Fédération pour la promotion du commerce spécialisé), regroupant 310 enseignes, a tenu sa conférence de presse trimestrielle le 19 octobre dernier. L’occasion de faire le point sur l’activité des enseignes du commerce spécialisé à l’issue des neuf premiers mois de 2023 et sur les perspectives pour les prochains mois.

Principal constat : la demande est sous pression et les coûts augmentent plus vite que les chiffres d’affaires et les marges. Sur la période janvier/septembre, les magasins réalisent des chiffres d’affaires en hausse de 3,3 % comparativement à 2022 (80 enseignes interrogées sur leurs performances en France). Mais, le mois de septembre a été mauvais, à -4,2 % et inquiète. Quant à l’activité du mois d’octobre, elle n’est pas, à ce jour, de nature à rassurer (-11,1 % de fréquentation des points de vente, selon l’Observatoire Procos/Stackr de la fréquentation des magasins). « La plus importante période de l’année, pour une grande partie de nos secteurs et enseignes, commence maintenant, avec la fin de l’année, a rappelé Emmanuel Le Roch, délégué général de Procos. Il faut que l’activité reparte rapidement, car c’est le résultat des entreprises qui se joue ».

Plus dans le détail, +3,3 % en valeur dans les magasins après neuf mois, signifie une stagnation des ventes en volume, les prix ayant augmenté en moyenne de 3 % durant la période. Les chiffres des magasins ont été maintenus artificiellement par cette hausse des prix, mais à un niveau largement inférieur à celui de la hausse des coûts, problème majeur… qui perdure.

Comme à l’accoutumée, tous les secteurs ne sont pas dans la même situation. La beauté/santé apparaît comme un secteur atypique, avec des croissances qui restent soutenues par rapport à 2022 (+10,1 %), grâce à des hausses de prix qui ont été importantes et malgré la multiplication des promotions des acteurs pour maintenir les volumes vendus. Alimentaire spécialisé, restauration, services et optique, réalisent des performances alignées avec une moyenne globale du commerce spécialisé entre +3 % et +4 % en valeur, donc des volumes vendus comparables à ceux 2022. Équipement de la personne, équipement de la maison et – nouveauté –, le sport, connaissent des croissances très faibles en valeur par rapport à 2022 (entre +0,1 % et +1,5 %). Ce qui démontre la poursuite des baisses de volumes vendus, déjà constatées avant l’été. Reste le secteur cadeaux/culture/jouets, dont le chiffre d’affaires est en contraction par rapport à 2022 (-3,3 %). Il est vrai que ce secteur, en particulier le jouet, réalise la plus grande partie de son année au cours des derniers mois…

« Il est impératif que la hausse des prix des produits alimentaires soit stoppée, pour redonner de l’air aux ventes non-alimentaires et aux capacités de dépenses des Français dans ces secteurs » (Emmanuel Le Roch).

Durant cette période, les ventes web réalisent de moins bons résultats que les magasins, avec une hausse très faible (+1,1 %) de chiffre d’affaires, tous secteurs confondus, soit une croissance trois fois inférieure à celle des points de vente. Des chiffres qui actent la baisse des volumes vendus sur le web. Le secteur de la chaussure est le seul dont les ventes web (+6 %) sont mieux orientées que celles des magasins (+1,5 %). Il est vrai que ce marché est marqué par les difficultés importantes de plusieurs réseaux, entraînant des fermetures de points de vente.

En cumul magasins + Internet, la moyenne du commerce spécialisé est en hausse de 2,7 %, ce qui démontre une très légère baisse des volumes vendus. Trois secteurs sont en baisse sur la période : -0,2 % pour l’habillement et -0,6 % pour l’équipement de la maison, soit une contraction des volumes vendus dans ces secteurs de l’ordre de 3 % ; et comme constaté en juillet, le secteur cadeaux/culture/jouets est toujours en baisse en valeur par rapport à 2022 (-5,5 %).

Alors que cette fin d’année est marquée par les deux principaux phénomènes que sont le règne des prix bas et une pression à la baisse sur les volumes vendus, les responsables de Procos, concernant les perspectives pour les prochains mois, soulignent que, statistiquement et selon l’INSEE, « certains indicateurs macroéconomiques pourraient favoriser la consommation des produits non-alimentaires dans les prochains mois : contraction de l’inflation, même si celle-ci est lente ; pouvoir d’achat plutôt maintenu ; mais la confiance sera-t-elle suffisante ?… L’activité de la grande distribution alimentaire profite de l’inflation, mais cela met sous pression le non- alimentaire ». Les mêmes responsables s’inquiètent aussi, arguant que « de nombreux éléments génèrent de l’incertitude et des difficultés pour les enseignes. Le modèle économique se trouve dans un étau. » Et d’énumérer :

– « Il est impératif que la hausse des prix des produits alimentaires soit stoppée, pour redonner de l’air aux ventes non-alimentaires et aux capacités de dépenses des Français dans ces secteurs », indique Emmanuel Le Roch.

– La confiance des ménages français est au plus bas, et le taux d’épargne, au plus haut.

– Malgré les chiffres, les Français estiment que leur pouvoir d’achat s’est dégradé ; ce qui touche, de fait, les ménages les moins aisés (alimentaire, carburant, énergie).

– L’immobilier (logement) est durablement mal orienté, avec des impacts sur les secteurs de l’équipement de la maison.

– La situation sociale, la politique internationale (avec plusieurs conflits), le contexte sécuritaire, les incertitudes sur la disponibilité et les coûts de l’énergie, sont autant de paramètres qui font encourir des risques à l’économie en général, à la consommation en particulier et donc, au final, au commerce de détail.

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